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« Fritz Bauer, un héros allemand » de Lars Kraume. Critique dvd

Synopsis: En 1957, le procureur Fritz Bauer apprend qu'Adolf Eichmann se cache à Buenos Aires. Les tribunaux allemands préfèrent tourner la page plutôt que le soutenir. Fritz Bauer décide alors de faire appel au Mossad, les services secrets israéliens.

La fiche du DVD / Blu-Ray

Le film : "Fritz Bauer, un héros allemand"
De : Lars Kraume
Avec : Burghart Klaußner, Ronald Zehrfeld, Lilith Stangenberg, Jörg Schüttauf, Sebastian Blomberg
Sortie le : 13 septemb 2016
Distribution : ARP Sélection
Durée : 101 minutes
Film classé : Tous publics
Nombre de DVD / Blu-Ray : 1
Le film
Les bonus

Meilleur dvd Septembre 2016 ( 4 ème )

L’histoire de ce procureur allemand qui traquera sans cesse les nazis après la guerre est évoquée dans le très beau film de Giulio Ricciarelli « Le labyrinthe du silence ». Mais ici, Lars Kraume va bien au-delà de la mention. Il campe tout au long de son scénario co-écrit avec Olivier Guez, l’auteur de «  L’impossible retour » dont il s’inspire, le portrait de cet homme confronté à l’hostilité de son entourage.

Un peuple amnésique de ses années de plomb que sa propre administration place aussi sous l’étouffoir. Des juges, des avocats, des procureurs, des collègues parmi lesquels, seul, le jeune Angermann osera lui tendre la main. Une conspiration du silence portée par la mainmise des anciens dignitaires nazis dans les plus hautes sphères de l’Etat.

C’est tout l’enjeu du combat de Bauer que Lars Kraume ausculte à l’aune d’une politique gouvernementale dictée par des intérêts plus économiques que moraux. Le réalisateur démonte les rouages d’un mécanisme à la fois complexe et subtil, qui interdit quasiment toute velléité d’indépendance à une justice qui s’imagine pourtant souveraine.

Beaucoup d'affinités entre le jeune procureur et son patron ...
Beaucoup d’affinités entre le jeune procureur et son patron …

« Combien de gens perdraient le sommeil si Eichmann était jugé à Francfort ? » interroge Fritz Bauer qui malgré toutes les préventions de ses collaborateurs, parfois amis, décide de mener son combat à son terme.  Et en dépit de nombreuses menaces de mort …

Bauer est un homme seul. Personne ne l’attend le soir à son foyer et dans les couloirs du palais de justice, on le guette, on l’épie, on l’espionne. Ses moindres allées et venues sont signalées, un déplacement à l’étranger devient une affaire d’état. Car c’est bien là que réside le problème, révèle avec acuité le cinéaste qui pointe dans la politique d’Adenauer de l’époque cette volonté farouche d’une réconciliation avec Israël, sans pour autant instruire de dossier sur les responsables de l’holocauste.

« Personne de Bonn à Washington ne veut d’un procès Eichmann » répète à l’envie le patron de Bauer qui l’entend bien mais ne l’écoute déjà plus. A ses yeux, à ses oreilles, une autre Histoire a pris le chemin de la vérité. Bauer souhaite confronter les allemands à leur passé. Tenace, l’Histoire lui donnera en partie raison, mais il lui faudra encore bien des années avant que son nom ne s’inscrive en lettres d’honneur.

Burghart Klaußner est plus qu’admirable dans le rôle-titre. Il le tient avec conviction et certitude, comme habité par ce personnage qu’il aurait pu être. Il confère au film toute sa valeur historique, sa vision documentaire avec un sens de la vulgarisation que Lars Kraume a su lui montrer.

  • A voir également

« Hannah Arendt » de Margarethe Von Trotta ( Le procès Eichmann à Jérusalem )

« Le labyrinthe du silence » de  de Giulio Ricciarelli . ( La traque de Mengele et le procès d’Auschwitz ).

« Remember » de Atom Agoyan ( Un rescapé d’Auschwitz , des années plus tard, part en chasse après son bourreau)

LES SUPPLEMENTS

  • Making of (13.30 mn). « Tôt ou tard, tout réalisateur allemand se préoccupe de cette période folle du nazisme » relève le réalisateur « mais il est encore difficile de filmer ça en Allemagne aujourd’hui. Il faudrait adapter par exemple –Les bienveillantes-. Mais c’était quand même une belle tâche d’appréhender l’histoire ainsi, à travers cet extrait de la vie de Fritz Bauer ».

En suivant la préparation de quelques scènes, chaque membre de l’équipe intervient pour donner un point de vue, un éclairage sur le personnage principal , dont sa vie privée qui jusqu’en 2013 n’avait jamais été révélée dans une biographie.Il est intéressant d’entendre Ronald Zehrfeld parler de son personnage, Angermann, construction dramatique du réalisateur, qui n’a donc jamais existé. Il n’est pas sans rappeler cependant Radmann, le jeune procureur du Labyrinthe, qui lui a réellement vécu.

Ses collègues ne le lâcheront pas d'une semelle, dans l'attente du moindre faux pas...
Ses collègues ne le lâcheront pas d’une semelle, dans l’attente du moindre faux pas…

On découvre ensuite le soin avec lequel les décors ont été recomposés, dont le style Le Corbusier qui tapissait le bureau de Fritz Bauer, ce qui à l’époque était osé, relève la décoratrice.

  • Scènes coupées. Elles sont nombreuses, parfois répétitives effectivement de scènes existantes, parfois non, mais toujours intéressantes. Celle où apparaît le nom de Schumacher explique assez bien ce qui va suivre dans le film sur le passé de Bauer dans les camps de concentration. Mais ça passe aussi sans cette séquence…

 

Meilleur dvd Septembre 2016 ( 4 ème ) L’histoire de ce procureur allemand qui traquera sans cesse les nazis après la guerre est évoquée dans le très beau film de Giulio Ricciarelli « Le labyrinthe du silence ». Mais ici, Lars Kraume va bien au-delà de la mention. Il campe tout au long de son scénario co-écrit avec Olivier Guez, l’auteur de «  L’impossible retour » dont il s’inspire, le portrait de cet homme confronté à l’hostilité de son entourage. Un peuple amnésique de ses années de plomb que sa propre administration place aussi sous l’étouffoir. Des juges, des avocats, des procureurs, des…
Le film
Les bonus

C’est un peu le parallèle du film de Giulio Ricciarelli «  Le labyrinthe du silence » qui s’intéressait plus généralement à la traque des anciens bourreaux des camps de concentration. Ici Lars Kraume braque les projecteurs sur le combat acharné d’un procureur décidé à faire tomber Eichmann. Il fait un portrait très détaillé de ce Fritz Bauer qui contre sa propre administration et ses collègues ira à l’encontre des principes établis sur la normalisation de la vie politique de l’Allemagne de l’après-guerre. Avec l’aide d’un comédien extrêmement habité par ce personnage (Burghart Klaußner), le réalisateur fait un travail de vulgarisation essentiel autour d’un fait historique parfaitement retranscrit. S’il fallait le comparer avec le film de Ricciarelli, ce serait uniquement d’un point de vue historique et documentaire, sur des périodes quelque peu différentes. Car les deux essais cinématographiques sont d’excellentes tenues et importants pour la compréhension d’une histoire qui n’en finit pas d’alimenter la grande Histoire.

Avis bonus Des scènes coupées, à voir absolument et un making of très bien mené

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