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« Je verrai toujours vos visages » de Jeanne Herry. Critique cinéma

César 2024 : meilleur second rôle Adèle Exarchopoulos

César2024 des Lycéens

L’histoire : Depuis 2014, en France, la Justice Restaurative propose à des personnes victimes et auteurs d’infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles.

Nassim, Issa, et Thomas, condamnés pour vols avec violence, Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de vol violent, de braquages et de vol à l’arraché, mais aussi Chloé, victime de viols incestueux, s’engagent tous dans des mesures de Justice Restaurative.

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  • Le Film

Il y a peut-être un peu d’idéalisme au final, de naïveté sur l’épilogue. Emportée par son sujet, Jeanne Herry ne contrôle pas toujours ses réactions, ses émotions.

Tellement vraie, sa mise en scène s’empare de sa passion pour livrer à ses protagonistes cette rencontre inattendue entre détenus, libérables, victimes ou coupables, des hommes et des femmes qui un jour auraient pu se rencontrer dans de fâcheuses postures.

Sur la base du volontariat, la Justice Restaurative les met face à face, les confronte avant que ces situations ne se diluent dans un échange, un dialogue, une tentative de compréhension. L’équipe responsable ne compte pas sa peine pour préparer au préalable chaque intervenant , tisser les premiers liens.

Dans cette œuvre collective, Jeanne Herry a le bon sens d’ extraire un cas particulier, très personnel. Une jeune femme violée alors qu’était une petite fille, par son frère de trois ans son aîné.

Il est revenu au pays. Chloé pose rapidement les garde-fous pour une dernière rencontre et ne plus jamais le croiser. Sinon dans l’indifférence, et le mutisme.

 » J’ai perdu mon frère quand j’ai porté plainte. Pourtant je l’aimais »

Adèle Exarchopoulos est extraordinaire en femme hantée par ce traumatisme dont elle dit ne plus pouvoir sortir. Mais elle veut savoir, entendre les réponses qu’il n’a pas pu donner, parce que du haut de ses dix ans elle n’a pas su poser les bonnes questions.

Celles qui aujourd’hui détonnent dans cette prison où se réunissent en cercle inapproprié des personnes contraires. Le cambrioleur, la petite frappe, le braqueur .

Ils disent qu’eux aussi ont eu peur quand ils ont fait leur coup. Mais Nawelle ne veut pas l’entendre, toute colère rentrée, toute révolte contenue, si près de l’explosion. Leïla Bekhti donne le meilleur de l’expression retenue dans ce huis-clos informe ou se forment peu à peu des connivences, où se forgent des soutiens entre les victimes, des liens avec les détenus.

Les visages sont cadrés au plus près, les propos aussi. Et même les silences que la réalisatrice pose avec délicatesse sur le regard de Nassim , qui cherche à comprendre quand son voisin Thomas jette les armes. « Ca fait vingt-cinq ans que je fais des aller-retour entre la prison et l’extérieurDix minutes de braquage et ma vie est finie ».

Respectivement Dali Benssalah et Fred Testo, parfaits eux aussi au cœur d’une distribution pleine de cette humanité qui fait d’un scénario joliment écrit, des personnages vrais, entiers. 

29 mars 2023 en salle.- Durée : 120 mn . - Avec Adèle Exarchopoulos, Dali Benssalah, Leïla Bekhti, Elodie Bouchez, Sulliane Brahim, Gilles Lellouche, Fred Testo, Raphaël Quenard, Denis Podalydès, Miou-Miou, Jean Pierre Darroussin, César 2024 : meilleur second rôle Adèle Exarchopoulos César2024 des Lycéens L'histoire : Depuis 2014, en France, la Justice Restaurative propose à des personnes victimes et auteurs d’infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles. Nassim, Issa, et Thomas, condamnés pour vols avec violence, Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de vol violent, de braquages et de vol à l'arraché, mais aussi Chloé, victime…
Le Film

Pour un tel sujet qui requiert de toute évidence la technique du documentaire, Jeanne Herry puise à la fois dans cette rhétorique  ( les rencontres à la prison ) et dans l’apport d’une écriture fictionnelle ( la préparation des protagonistes, leur état d’esprit, la vie du dehors … ) . D’où cette narration totalement cohérente sur la forme retenue pour parler de la justice restaurative qui permet aux délinquants et à leurs victimes de se rencontrer. Les visages sont cadrés au plus près, les propos aussi. Et même les silences que la réalisatrice pose avec délicatesse sur le regard de Nassim , qui cherche à comprendre ses erreurs quand son voisin Thomas jette les armes. Les victimes n’ont guère d’indulgence, mais la parole est précieuse et dans le respect mutuel, la confiance gagne les cœurs. Il y a peut-être un peu d’idéalisme au final, de naïveté sur l’épilogue. Emportée par son sujet, Jeanne Herry ne contrôle pas toujours ses réactions, ses émotions. Tellement vraie, sa mise en scène s’empare de sa passion qui s’empare de nos émotions portées par une interprétation sans faille. Un casting étoffé, riche de fortes personnalités, plein de cette humanité qui fait d'un scénario joliment écrit, des personnages vrais, entiers. PS : C’est un film qui je pense fera parfois référence à d’autres films traitant eux-aussi de cette démarche qui peut s’appliquer de différentes façons. Voir par exemple « Les repentis » de Iciar Bollain ( dvd : 04 avril 2023 )

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