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« Hyènes » de Djibril Diop Mambety. Critique cinéma – dvd

Synopsis: Colobane, une petite cité, endormie dans la chaleur poussiéreuse du Sahel, fantôme d'une ville au charme foudroyé par la misère. Des griots annoncent une incroyable nouvelle : Linguère Ramatou, trente ans après, devenue archi-milliardaire, est de retour. Fini la pauvreté. Draman Drameh qui fut l’amant passionné de la jeune Linguère, se précipite le premier.

La fiche du film

Le film : "Hyènes"
De : Djibril Diop Mambety
Avec : Ami Diakhate, Mansour Diouf
Sortie le : 02/01/2019
Distribution : JHR Films
Durée : 110 Minutes
Genre : Comédie dramatique
Type : Long-métrage
Le film

L’influence du conte africain, le continent où l’histoire prend racine. Mais à l’origine, c’est un village suisse qui sert de décor au récit imaginé par le romancier Friedrich Dürrenmatt. Le réalisateur-scénariste sénégalais le transpose trait pour trait dans son pays de connaissance et l’adapte de manière presque respectueuse.

En gommant les particularismes helvétiques au profit du singularisme africain Djibril Diop Mambety confirme la vision universelle de l’auteur sur les affres et travers de la condition humaine.En revenant dans sa ville natale d’où elle a été chassée, enceinte, il y a trente ans, Linguère Ramatou suscite désormais le respect et l’envie. Elle est riche à ne plus que savoir en faire et Colobane croule sous la misère. La vieille dame entend bien aider généreusement ses concitoyens, mais en y mettant les formes…

 

« La joie désintéressée que vous inspire ma visite… » dit-elle pour introduire sa venue est à son image. Elle ne manque ni d’à-propos, ni de réparties. Elle vient régler des comptes, c’est une évidence et les vieilles histoires qui en émergent rapetissent encore plus le décor poussiéreux du village.

Djibril Diop Mambety le filme avec un œil aussi attendri que désolé, témoin impuissant du drame qui se trame. La dame est très exigeante, et sans pitié. C’est fabuleux la manière dont elle  et son réalisateur repassent les plats refroidis des histoires d’autrefois, accompagnée de sa cour impassible, d’une femme-flic asiatique et d’un étrange personnage qu’aucun villageois n’a encore reconnu.

L’attitude faussement prévenante de Ramatou règle avec superbe, la mise en scène, entre l’ostentation et le précieux, le ridicule et la bassesse.

Du vent qui balaie tout sur sur son passage. La vanité des hommes, leurs suffisances, l’ironie et le grotesque des situations. Une introspection désastreuse, mais remarquable, presque magnifique derrière la caméra du cinéaste sénégalais dont on se retient d’en dévoiler chaque objectif .La machination orchestrée par la pestiférée d’autrefois a des relents machiavéliques.

Les hommes se révèlent en eux-mêmes, tristes personnages d’une comédie pitoyable. C’est encore la dame qui en impose ses règles. « Le monde a fait de moi une putain, je veux faire du monde un bordel ».

On laissera la morale se révéler à elle-même. Tel un exutoire à la connerie ambiante. Elle est malheureusement toujours très présente.

LES SUPPLEMENTS

  • « Ninki Nanka, le prince de Colobane » de Laurence Gavron ( 45 mn- 1991 )-Djibril Diop Mambéty sur le plateau de « Hyènes », on le voit, on le suit, on l’entend ( difficilement, le son n’est pas très bon ). Un making of, mais aussi et surtout un portrait du réalisateur .

On remonte vers son passé, ses proches et ses amis parlent de lui ( «  il a le rôle du voyant » dit-on respectueusement ) . C’est un documentaire atypique, avec une image en couleur peu contrastée, parfois flou

 

  • Entretien avec Wasis Diop ( 10 mn )- Le frère et le compositeur de la bande-son. Il explique comment et pourquoi son frère était imprégné par la musique, « via son passage dans les écoles coraniques où l’on chante beaucoup ».

Ses premiers pas au théâtre ( « Macbeth » ) «  où il n’est pas resté très longtemps, car c’était un révolutionnaire , le théâtre était géré par des administratifs … ».

«  Tous les personnages de ses films sont des éléments de son existence, c’est lui-même » …

Son engagement politique . Quand il prévenait que « l’Afrique était la proie des vautours, il avait malheureusement raison , ce n’est pas de l’esthétisme pour l’esthétisme, mais un véritable engagement politique et je constate vingt ans après qu’avec «  Hyènes » son message est passé ».

Quelques pièces dessinées par Oumou Sy
  • « Le fil » d’ Oumou Sy de Taiëb Louhichi. ( 26 mn )- Costumière de «  Hyènes »

Un joli portrait de la styliste sénégalaise, qui porte la mode africaine au-delà des frontières de ce continent. Elle crée, enseigne et marque ses défilés d’une originalité égale à celle de ses créations . Une femme d’affaires avisée nous dit encore le documentaire, qui consacre la seconde partie à la création autour de « Hyènes » ( photo) .

Et à son rôle de mère de famille …

« Adieu à l’Afrique » de Pierre-Alain Meier ( 10 mn )- Une dizaine d’années plus tard, le producteur du film revient sur les lieux du tournage, et découvre surpris à la place des anciens décors un vaste bunker plus ou moins culturel où travaille notamment … Oumou Sy ! «  C’est le destin » sourit-elle en l’accueillant.

C’est son dernier voyage en Afrique, assure-t-il .

DVD : 06 Décembre 2022 Librement adapté de la pièce « La visite de la vieille dame » du dramaturge suisse Friedrich Dürrenmatt. Meilleur dvd Décembre 2022 (7ème) L’influence du conte africain, le continent où l’histoire prend racine. Mais à l’origine, c’est un village suisse qui sert de décor au récit imaginé par le romancier Friedrich Dürrenmatt. Le réalisateur-scénariste sénégalais le transpose trait pour trait dans son pays de connaissance et l’adapte de manière presque respectueuse. En gommant les particularismes helvétiques au profit du singularisme africain Djibril Diop Mambety confirme la vision universelle de l’auteur sur les affres et travers de…
Le film

L’histoire est universelle et le cinéaste nous le prouve intelligemment en transposant le récit suisse du dramaturge Friedrich Dürrenmatt dans un village fantôme du Sahel. Là où revient une vieille femme qui au temps de sa jeunesse en fut chassée. Riche et revancharde, la dame va semer un bonheur illusoire au cœur de cette communauté avide d’une richesse dont elle ignore les méfaits. Ça tient du conte et de la satire, réflexion pertinente sur le pouvoir quand il s’applique uniformément à vouloir détruire sans restriction. La posture de l’héroïne tout à fait exemplaire (avec sa cour et ses sbires) guide joliment une mise en scène tout aussi pertinente. L’interprétation suit le rythme, le mouvement et la musique de Wasis Diop, le frère du réalisateur.

AVIS BONUS Un portrait du réalisateur autour du film ( une sorte de making of ) . Le point de vue très éclairant de son frère Wasis Diop. Un portrait d’une styliste à l’aura internationale et le clin du producteur

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